1. L'addiction

  J'ai 17 ans, je suis en première. Premièrement, je me suis dit que je pouvais arrêter quand je voulais. Comme tout le monde, je pense. Mais quand j'ai compris que j'avais besoin de me sentir bien, j'ai commencé à rater les cours. J'ai compris que ça allait commencer à être plus fort que moi. Un comportement qui donne du plaisir et qui soulage un malaise intérieur, mais que tu n'arrives pas à contrôler. C'est ton cerveau qui réclame, même quand ça te fait mal. En clair, tu sais. Mais tu recommences encore et encore. L'environnement contribue à des consommations de substances psychoactives, mais ça ne suffit pas à expliquer la dépendance en présence de drogues. Pourquoi quelqu'un qui essaie, qui en prend, y compris de manière festive, s'arrêterait là ? Et pourquoi un autre va devenir accro ? Et c'est là que l'équation personnelle entre en jeu. Ça détruit pas mal de choses. J'ai perdu, j'ai perdu des amis, j'ai perdu des relations avec ma famille, elles se sont dégradées. J'ai abandonné mes études pendant un an, comme je vous l'ai dit, et je me suis isolé un peu de tout. Mais du coup, c'est quoi l'équation personnelle ? En addictologie, c'est un concept qui aide à comprendre pourquoi une personne est plus ou moins vulnérable à l'addiction. L'addiction ne dépend pas que de la substance, elle dépend aussi de la personne, son histoire, ses émotions, son environnement et du contexte dans lequel elle consomme. La vraie question à dire au jeune, c'est : chaque fois qu'il consomme quelque chose, qu'il s'interroge vraiment : « Qu'est-ce que ça vient faire dans ma vie ? » Cette consommation-là, je la prends pour quels besoins ? Je réponds. C'est pour ça que je dis : si vous voulez être utile à des jeunes aujourd'hui, invitez-les systématiquement à se poser la question : Pourquoi tu consommes ça, toi ? Pas tes copains, toi ? Et quelle place ça prend dans ta vie ? C'est ça la question à poser à chacun. C'est un peu de tout. La curiosité d'abord. C'était la pression de mes amis qui me disaient que c'était cool. Et si on s'aperçoit que c'est un besoin compliqué, parce qu'on est mal dans sa peau, parce qu'on communique mal avec ses parents, parce qu'on ne sait pas quel est son vrai genre au niveau sexuel, parce qu'on ne sait pas de quoi l'avenir va être fait... Bref, si on est vraiment pas bien dans sa peau et qu'on se met à avoir besoin d'un produit, c'est là qu'il y a danger. Mais aussi, pour bien s'en rendre compte, t'as pas à faire semblant que tout va bien. Même si t'essayes de tenir une taffe, ça ne va pas réparer ce que tu ressens. C'est ok de flancher, mais tu n'es pas obligé de traverser ça tout seul. Il y a des gens là, prêts à t'écouter. Il faut juste oser dire un mot.